• le Petit Dictateur illustré.

    En janvier 2020, Emmanuel Macron, Président de la République avait tempêté, à propos du climat politique en France :

    "Aujourd'hui s'est installée dans notre société, et de manière séditieuse, par des discours politiques extraordinairement coupables, l'idée que nous ne serions plus dans une démocratie, qu'une forme de dictature se serait installée.../... Une dictature, c'est un régime où une personne ou un clan décident des lois../... Si la France c'est cela, essayez la dictature et vous verrez !."

    Un article dans le pourtant très politiquement correct "l'Opinion" nous donne l'occasion d'essayer et d'y aller voir de plus près :

     

    Emmanuel Macron aux manettes, les ministres à la remorque.

    (l'Opinion - Nathalie Segaunes - 11 décembre 2020 à 06h00)

    le Petit Dictateur illustré.

    Par deux fois ces dernières semaines, Emmanuel Macron a annoncé des décisions sans en avoir informé les ministres concernés. Une méthode singulière, qui peut prendre ces derniers de court.

     

    L’anecdote est connue, elle a même donné le titre d’un livre. Un jour de 1989, le Premier ministre Michel Rocard, lors d’un tête à tête avec François Mitterrand, se propose de réformer le monde du renseignement. "Si ça vous amuse…", répond le Président, faussement indifférent, mais donnant tout de même un blanc-seing à son chef du gouvernement pour intervenir dans son domaine réservé.

    Imagine-t-on Emmanuel Macron formuler ce genre de réponse ? L’actuel locataire de l’Elysée vient de nouveau, ces derniers jours, de faire la démonstration que lui seul décide, en tout domaine.

     

    Ainsi est-ce lui qui décide et annonce mardi, sans y associer son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, la tenue d’un "Beauvau de la sécurité" dès janvier sur la réforme de la police, réunissant représentants des forces de l’ordre, élus et citoyens. "C’est un peu une façon de dire à Darmanin, après le fiasco de l’article 24 : je décide, tu exécutes", estime un conseiller de l’exécutif. Et tant pis si un Livre Blanc sur la sécurité, fruit d’un an de travail et de concertations place Beauvau, a été publié mi-novembre, avec 200 propositions censées répondre aux mêmes objectifs…

    Découvrant l’annonce présidentielle, les parlementaires LREM informent Matignon qu’ils souhaitent interroger le ministre de l’Intérieur sur "le Beauvau de la sécurité" à la séance des questions au gouvernement. On les prie de s’abstenir : le Président n’ayant pas -encore- associé l’exécutif à cette initiative, il sera difficile de leur répondre…

    Isolement. Autre exemple récent, lorsqu’Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée du 24 novembre, appelle le Parlement à  fixer les "conditions pour assurer l’isolement" des cas positifs de Covid-19, car "nous devons être plus contraignants à l’égard de celles et ceux qui ont le virus" : ni le Premier ministre Jean Castex, ni le ministre de la Santé Olivier Véran, n’ont été prévenus de cet "appel".

    Si le sujet de l’isolement des cas positifs était en discussion depuis plusieurs semaines au sein de l’exécutif, toute mesure coercitive semblait a priori exclue. "Le débat pourrait avoir lieu, il toucherait au cœur des libertés fondamentales", avait mis en garde Olivier Véran, lors de son audition devant la commission d’enquête parlementaire le 4 novembre. Ajoutant que "cela n’a jamais été fait dans notre pays, même dans le cas de la tuberculose."

    Jean Castex, interrogé le 17 novembre par la même commission de l’Assemblée nationale, s’était montré, face aux députés, très dubitatif à l’égard de ce système "...où vous êtes géolocalisés avec votre portable". Comment cela fonctionnerait-il "...avec les mentalités de nos concitoyens ?", s’était-il interrogé, redoutant par ailleurs que "la perspective d’un isolement obligatoire désincite certains à se faire tester."

    Depuis le 24 novembre, le gouvernement ne semblait d’ailleurs guère pressé de répondre à l’appel du Président. A l’Assemblée nationale, le groupe Agir (aile droite de la majorité) plaide pour que l’isolement obligatoire, avec sanctions à la clé, soit intégré dans le projet de loi transcrivant dans le droit commun certaines mesures de l’Etat d’urgence sanitaire, qui sera débattu mi-janvier. Jeudi soir, Jean Castex annonçait finalement que l’idée d’isoler les cas positifs était abandonnée...

    Capteurs. Avec quel infectiologue, quel épidémiologiste, quel immunologue Emmanuel Macron a-t-il échangé durant cette deuxième vague, qui l’a convaincu, malgré les réticences de son gouvernement, d’envisager l’isolement obligatoire des personnes positives ? Car ses décisions sont souvent le fruit de ces remontées directes du terrain, de ces "capteurs" qui alertent le Président sur telle ou telle difficulté et nourrissent sa réflexion. "Au moment de la campagne, son répertoire téléphonique comprenait six mille contacts. Depuis, il s’est enrichi", révèle notre consœur Corinne Lhaïk dans Président cambrioleur (Fayard), qui vient de paraître.

    Parfois, certains de ces "capteurs" font leur entrée au gouvernement. Paradoxalement, le chef de l’Etat ne les consulte plus autant. "J’ai beaucoup moins de SMS d’Emmanuel Macron depuis que je suis ministre...", s’en amusait récemment l’un d’entre eux, nommé en juillet.

    "La plupart du temps, Macron ne tranche pas pendant les réunions, observe l’un de ses proches. Mais il décide après, une fois seul, dans sa tête, et il communique". Une façon de faire qui rapproche l’actuel Président de Nicolas Sarkozy : ce dernier n’informait pas toujours son Premier ministre ou ses ministres de ses résolutions. Mais au moins informait-il Claude Guéant, secrétaire général de l’Elysée, "qui appelait le ministre concerné, pour le prévenir", se souvient un ancien conseiller de l’Elysée.

    Alexis Kohler, actuel secrétaire général de la présidence, ne prévient pas les ministres : "A sa décharge, il découvre souvent les arbitrages en même temps que tout le monde", assure un ancien conseiller.

    Depuis le début de son quinquennat, Emmanuel Macron n’aura cessé de déstabiliser ainsi ses ministres, par des décisions de dernière minute qui les prennent de court.

    Ainsi, le 9 juillet 2018, le Président annonce-t-il au Congrès de Versailles que "la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel", portée par Muriel Pénicaud, "va être modifiée", alors qu’elle est en plein examen au Parlement : syndicats et patronat sont priés de renégocier les règles de l’assurance chômage, alors que le projet de loi prévoit un dispositif.

    Ce mode de fonctionnement présidentiel est surtout propre aux périodes de crise. "Toutes les annonces Gilets jaunes, on les a découvertes en écoutant la conférence de presse d’Emmanuel Macron, le 10 décembre 2018", assure ainsi le conseiller d’un ministre.

    De la même façon, le chef de l’Etat annoncera son projet de Convention citoyenne pour le climat pour répondre aux Gilets jaunes, après avoir rencontré le réalisateur et militant écologiste Cyril Dion et l’actrice Marion Cotillard. Mais sans avertir au préalable son Premier ministre de l’époque, Edouard Philippe…

     

     

     

     

     

     

     

     

    « Question de confort ?...[hors-sujet] »

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  • Commentaires

    1
    Pangloss
    Vendredi 11 Décembre 2020 à 18:06

    Macron n'est peut-être pas un dictateur mais il ressemble fortement à un autocrate.

      • Vendredi 11 Décembre 2020 à 19:40

        @ Pangloss...?

        La différence existe (j'ai dû utiliser toutes les ressources de Google et de Wiki pour commencer à la distinguer), mais elle est subtile. Réelle mais subtile...

        Mais ça foutait en l'air ma petite introduction sur la déclaration de Président !

         

    2
    Lucide
    Vendredi 11 Décembre 2020 à 18:16

    Depuis quand le maître devrait-il consulter ses laquais ou les prévenir de ses caprices ? Au Tyrannistan, la populace doit certes vivre dans l'inquiétude et l'incertitude permanentes, mais les valets aussi. Le caractère imprévisible des foucades, c'est un procédé de gouvernement pour que les exécutants et les victimes gardent leur sujétion présente à l'esprit. Une humiliation de plus. Au reste, les gens sont des chiens : les mauvais traitements les font ramper encore plus, et revenir vers leur bourreau. La route vers la servitude admet de nombreux détours.

      • Vendredi 11 Décembre 2020 à 19:57

        @ Lucide...?

        ...réflexion faite, je me demande (je me suis souvent demandé) si Président est vraiment un terrible dictateur de la trempe des Amin Dada, Bokassa, Staline ou Mao Tsé Toung (ou "Zedong"), ou un pauvre gosse paumé, égaré dans la cour de récré des grands, et qui voudrait convaincre ceux dont il voudrait tant faire ses copains qu'il en a une aussi grosse qu'eux pour qu'ils le laissent, avec eux ou à leur place, tirer les cheveux et se moquer des tout-petits...?

         

      • Psy
        Vendredi 11 Décembre 2020 à 22:54

        L'absence de capacités intellectuelles décentes interdit évidemment l'hypothèse du despote à la Staline ou à la Mao. Le caractère foncièrement malsain interdit celle du tyran à l'africaine, qui n'est que cruel.

        A un autre siècle, on le qualifiait de femmelin. A un siècle plus lointain encore, notre Nerogula (Calinero rappellerait trop le nom d'un philosophe nihiliste) poussait ce cri de femelle hystérique (non, pas celui du brochet) : "Hoc volo, sic jubeo, sit pro ratione voluntas.", "Je le veux, je l'ordonne, que ma volonté tienne lieu de raison !" (voir la sixième satire de Juvénal pour le contexte). Ivresse du pouvoir sans limites, sans la moindre opposition, sans la moindre barrière. L'individu, ayant transgressé les lois divines et humaines, se prend réellement pour un petit Jupiter -- une étoile ratée, selon les astronomes. Comptant sur l'universelle couardise, il peut imposer tout ce qu'il veut, tant que ses maîtres le soutiennent et surtout tant que les milichiens lui obéissent comme des... justement.

        Certains l'appellent Macronescu. Nomen omen. Faut en accepter l'augure. A en croire Valeurs, un de ses sous-fifres, un certain Leboche, aurait osé énoncer une variante du célèbre "Qu'ils me haïssent pourvu qu'ils me craignent". L'entourage d'un kapo est évidemment composé de kapos.

        "Il impose tyranniquement des points de vues et théories dont le plus élémentaire réalisme et le plus terre-à-terre bon sens démontrent la prétention, la vanité, l'inanité ou à tout le moins l'arbitraire. [...] Le sujet refuse la réalité au nom du pouvoir qu'il a, qu'il brigue ou qu'il veut conserver. Il n'entend pas soumettre ses idées à la tyrannie des faits. Il ne craint aucun abus, et s'entoure volontiers d'incapables qui ne s'opposeront pas à ses volontés."

         

      • Samedi 12 Décembre 2020 à 13:39

        @ Psy...

        Vous évoquez "valeurs Actuelles"... Une des chroniques hebdomadaires, signée de l'historien Philippe Delorme, revient sur les "énigmes de l'Histoire".

        Macron n'est pas encore rentré dans l'histoire de France (dans la mesure où il existera encore une France et une Histoire), mais je serais curieux de savoir comment le successeur de Delorme présentera Not' Bon Président dans quelques dizaines d'années ? 

        Peut-être un ironique : "2017-2037... Mi Dieu, mi Maître... Vive l'enarchie !"

         

    3
    Vendredi 11 Décembre 2020 à 20:56

    Nous sommes dans un régime présidentiel, mais Macron ne peut pas faire ce qu'il veut, ce qu'un dictateur ou une autocrate peut faire en muselant l'opposition et les médias. Est-ce le cas en France ?

      • Samedi 12 Décembre 2020 à 10:16

        @ Dr WO...!

        Vous avez raison.

        Ni l'opposition (?) ni les médias (!) ne sont muselés.

        D'ailleurs on ne déplore ni opposant exécuté ou suicidé sommairement, ni journaliste contraint à l'exil, mais...

        - l'opposition s'est muselée elle-même quand les ex-UMPS de droite et les anciens UMPS de gauche, les plus opportunistes et/ou  les plus vénaux, se sont ralliés au gloubi-boulga du "en-même-temps" et du "ni-ni" macroniens, les autres faisant plus ou moins le dos rond pour ne pas se faire filloniser lors d'une campagne politoco-médiatico-judiciaire. Les deux ou trois "opposants" restant n'ayant qu'une valeur de figurants ou de faire-valoir à peine symbolique.

        - les médias n'ont pas besoin d'être muselés, les grands patrons de la presse et leurs employés aux écritures partageant les mêmes idéologies progressistes, européistes, mondialiste et anti-nationalistes que l'actuel détenteur du pouvoir présidentiel. Et la seule exception de Zemmour, à une heure de grande écoute sur une grande chaine télé, relève moins d'une volonté de respect du pluralisme et de la liberté d'expression que d'un intérêt pour l'audimat (tant que trop d'annonceurs ne rompront pas leurs contrats avec la chaine).

        etc., etc...:  sur le fonctionnement de l'Assemblée Nationale (procédure "vote bloqué" organisant l'état d'urgence et "actant" de la confusion entre exécutif et législatif... recours à un second scrutin en cas de premier vote non conforme aux résultats espérés, etc., etc...

        Disons, alors, un régime présidentiel un tout petit peu autoritaire, qui s'éloigne de plus en plus du régime parlementaire de la Cinquième République, même si -en même temps-, Macron a jugé opportun de s'approprier la Croix de Lorraine dans les armoiries de la République...

         

      • Le Page
        Samedi 12 Décembre 2020 à 14:09

        Il est évident que nous ne sommes pas dans un régime dictatorial ou autocratique. La preuve par les résultats aux élections de notre grande nation démocratique, phare brillantissime éclairant le monde entier.

        Élections présidentielles: au premier tour, Monsieur Macron obtient 18.4% des voix des inscrits après que son principal rival ait été mis hors course pour avoir endossé des costumes gênant aux entournures. On notera qu'il n'est pas le premier à obtenir un score aussi peu consensuel. (Chirac en 2002...)

        Élections législatives: La légitimité lui viendra-t-elle par ses députés? Résultats 1er tour: 6.391 269 voix sur           47 300 000 inscrits. soit un énorme 13.47 %. . Au deuxième tour après bidouillages d'usage, 7 826 000 voix soit 16.5%..

        Et c'est donc avec ce score remarquable qu'il obtient une majorité à l'assemblée pouvant en toute légalité pondre lois et décrets qui s'imposeront aux 85% des gens qui n'ont pas voté pour lui.

                A cela bien sûr on répondra: c'est la Constitution, la Loi, et éventuellement les CRS si vous contestez cette démocratie exemplaire (cf Gilets jaunes).

         

         

         
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      • Samedi 12 Décembre 2020 à 14:57

        @ Le Page...!

        Et ces scores édifiants, témoignant de la popularité de madame et monsieur Macron, se confirment jour(s) après jour(s) aussi bien aux élections municipales de mars et juin 2020 ("déroute") qu'aux dernières législatives partielles ("débâcle").

        La faute au virus pangolin qui, avec le concours exceptionnel de messieurs Salomon et Véran, a mis les concitoyens de fort méchante humeur

        Heureusement les prochaines élections, régionales et/ou/ni départementales, prévues en 2021 seront certainement reportées à une date plus ou moins ultérieure, ce qui permettra de voir venir et de séparer le chiendent de l'ivraie avant le replébiscite citoyen face au ténor de l'opposition : Jean-Marie Bigard ou Cyril Hanouna.

         

         

    4
    Souris donc
    Samedi 12 Décembre 2020 à 10:42

    "Rien ne me plait autant que la tente de Khadafi à l’Elysée, sauf peut-être le couronnement de L’Empereur Bokassa 1er et l’émission Aló Presidente de Ugo Chavez.

    Le culte de la personnalité est une grande chose qui fédère la foule et fait taire l’opposant."

      • Samedi 12 Décembre 2020 à 14:10

        @ Souris donc...!

        Question "culte de la personnalité", on a ce qu'il faut. Et ça fait même un peu plus, je vous le laisse quand-même ?

        S'appeler Emmanuel Macron et créer ex nihilo un mouvement baptisé "En Marche"...

        ...c'est un peu comme si Charles de Gaule avait créé la "Compagnie des Gaulois", Marine le Pen "Maintenant la Patrie", ou Jean-Luc Mélenchon "Jamais la 'Marianne'"...

                

         

         

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